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Résumé

"Enfin la terre de Betawi se déploie sous mes pieds. J’inspire profondément l’air du bord de mer. Adieu, navire, adieu, mer, adieu à tout ce qui fait partie du passé, sans excepter les expériences des jours sombres. Adieu. Je pénètre l’univers de Betawi et j’entre dans le XXe siècle. À toi aussi, XIXe, adieu ! Je suis venu m’affirmer, chercher la grandeur et le succès."
Voici Minke en homme nouveau. Laissant derrière lui Surabaya pour la capitale des Indes néerlandaises, il entre à l’école de médecine – la seule école supérieure ouverte aux Indonésiens. Triste reflet du système en place : Minke doit renoncer à ses vêtements européens pour se vêtir à la mode javanaise, et marcher pieds nus. Où que Minke se tourne, même dans les cercles hollandais réformateurs, il se heurte au mur de la domination coloniale, à l’exploitation des terres et des hommes au service de l’industrie sucrière. Mais le sésame est ailleurs – dans cette lettre qu’il doit remettre à Mei, une jeune chinoise militante. Grâce à elle, Minke passe à l’action : il crée un premier syndicat, une association pour l’éducation des masses, un journal indépendant en malais …
L’heure de la révolution a sonné !

Mon Commentaire

Pour ceux qui suivent la saga du célèbre auteur indonésien Pramoedya Ananda Toer, dans ce troisième tome de ‘Buru Quartet’, le héros indigène Minke a quitté Surabaya pour Betawi (nom malais de Jakarta, capitale actuelle de l’Indonésie), où il débute des études à l’école de médecine, seule école supérieure ouverte aux Indonésiens. Nous nous retrouvons cette fois au tournant du siècle, et Minke va devoir faire face à de nouvelles habitudes, en commençant par l’étrange coutume qui consiste en l’abandon des habits européens pour se vêtir à la mode javanaise, notamment en marchant pieds nus, coutume particulièrement avilissante…

Mais ce qu’il découvre à Betawi dépasse de loin tout ce qu’il avait d’ores et déjà observé précédemment, notamment en matière de domination coloniale hollandaise. Au point parfois de le voir se désespérer de faire changer les choses.

Dans ce nouvel opus, on suit Minke dans sa quête pour plus de justice et d’équité pour le peuple indonésien. L’étincelle de départ pour une évolution vers une société plus égalitaire se fera suite à sa rencontre avec Mei, une jeune Chinoise émigrée clandestinement à qui il doit remettre une lettre de première importance…De leur rencontre émergera enfin une action concrète : d’abord la naissance d’une première organisation de défense des locaux apparentée à un syndicat, puis la mise en place d’une association pour le droit à l’éducation, et même un journal, diffusé à travers tout le pays.

Même si un fond romantique perdure rendant l’histoire plus prenante car plus dynamique et impliquant des sensibilités humaines, c’est toujours avec beaucoup d’intérêt que l’on suit les petits pas avec lesquels évolue la société indonésienne d’alors, répartie sur d’immenses territoires insulaires où les coutumes et les religions différaient souvent. L’aspect romantique contribue d’ailleurs à faciliter la compréhension de certains thèmes abordés beaucoup plus ardus, surtout lorsqu’ils touchent la politique ou philosophie.

L’auteur évoque aussi l’évolution des forces des puissances mondiales au-delà de l’Indonésie, notamment avec en Asie la montée de l’impérialisme japonais, puissance désormais alliée des états occidentaux coloniaux que sont l’Angleterre et les Pays bas (ici, on ne parle pas de la France). Ces derniers se livrent également une lutte permanente pour maintenir une toute-puissance sur les territoires colonisés, y compris jusqu’en Afrique du sud. Le romancier en profite aussi pour témoigner du déclin de la puissance de l’Empire Chinois sur le règne gangréné de l’impératrice Tseu-Hi, qui finit par sombrer après la révolution des Boxers et la pression britannique, ainsi que la présence grandissante des commerçants du Moyen Orient sur le territoire…

Avec ‘une empreinte sur la terre’, Pramoedya Ananda Toer nous livre une fois de plus un passionnant descriptif de l’histoire de l’Indonésie au début du XXème siècle. Dans ce troisième tome, il évoque également pour la première fois les contraintes religieuses et les traditions qui peuvent constituer aussi des blocages dans la recherche de davantage d’égalité et de liberté, alors que se dessinent les contours de la Grande Guerre…

Ma note : 16/20
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Photo Babelio.com

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