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Résumé 

Dans un petit village abandonné de la «zone grise», coincé entre armée ukrainienne et séparatistes prorusses, vivent deux laissés-pour-compte: Sergueïtch et Pachka. Désormais seuls habitants de ce no man’s land, ces ennemis d’enfance sont obligés de coopérer pour ne pas sombrer, et cela malgré des points de vue divergents vis-à-vis du conflit. Aux conditions de vie rudimentaires s’ajoute la monotonie des journées d’hiver, animées, pour Sergueïtch, de rêves visionnaires et de souvenirs. Apiculteur dévoué, il croit au pouvoir bénéfique de ses abeilles qui autrefois attirait des clients venus de loin pour dormir sur ses ruches lors de séances d’«apithérapie». Le printemps venu, Sergueïtch décide de leur chercher un endroit plus calme. Ayant chargé ses six ruches sur la remorque de sa vieille Tchetviorka, le voilà qui part à l’aventure. Mais même au milieu des douces prairies fleuries de l’Ukraine de l’ouest et du silence des montagnes de Crimée, l’œil de Moscou reste grand ouvert...

'Les abeilles grises' a obtenu le Prix Médicis Etranger 2022

Mon Commentaire

‘Les abeilles grises’, c’est l’histoire de deux hommes, Sergueïtch et Pachka, les deux seuls habitants restés dans un petit village abandonné du Donbass, aux confins de la ‘République de Donetsk’ et de l’Ukraine alors que la guerre dans la région continue depuis des années de faire rage au-dessus de leur tête. Alors que cette zone n’est sous le contrôle de personne, que l’électricité dans le village a été coupé et les magasins sont fermés, les deux habitants que tout oppose mais qui se connaissent depuis leur plus tendre enfance sont contraints de s’adapter, mais aussi de coopérer, surtout au cours de la longue période d’hiver durant laquelle le ciel bas, le froid et la neige font se confondre les jours et les nuits. 

De son côté, Sergueïtch, séparé de sa femme et sa fille, se targue d’être un apiculteur avisé qui croit au pouvoir bénéfique de ses abeilles, qui assure que de faire une sieste allongé sur ses ruches est bénéfique pour la santé et dissipe tous les mots. Il possède également une vieille Tchetviorka qui lui donne une impression de liberté, avec le pouvoir aisément s’échapper de son ‘ghetto’ à la belle saison afin que ses abeilles puissent butiner loin des tensions guerrières. 

Si Pachka semble plus secret sur sa vie privée, il est clair qu’il fait partie de rouages économiques voire militaires qui lui permettent plus facilement de se ravitailler en nourriture et d’échapper plus confortablement à ces conditions de vie plus que rudimentaires. Dans cette atmosphère de dénuement et de solitude, les deux ‘voisins’ frères ennemis n’ont pour choix que de veiller l’un sur l’autre, de partager quelques moments autour de verres de vodka ou de gnôle en évoquant le passé mais aussi leur ressenti face à un conflit qui s’enlise…

Force est de constater que le romancier Andreï Kourkov restitue avec talent l’atmosphère lourde et répétitive de la vie des deux acolytes, qui confine à une sorte d’hibernation assortie d’une certaine somnolence et de la perte de repère temporel.… La période d’hiver occupant pratiquement la moitié du livre, l’attention du lecteur se déplace davantage sur l’analyse de cette situation géopolitique absurde, alors que l’auteur pose un regard ironique et parfois humoristique sur la situation…

La seconde partie du roman, celle au cours de l’échappée voiture en de Sergueïtch avec ses ruches hors de la zone de conflit s’avère beaucoup plus originale mais aussi plus intéressante  puisqu’elle reflète les conditions de vie quotidienne de la population rurale ukrainienne…Et puis s’ensuit la période de la villégiature de l’apiculteur en Crimée, eldorado tout récemment annexé par les troupes russes de Poutine. Les passages concernant la traversée ubuesque des ‘frontières’, mais surtout ceux relatifs à l’analyse de la cohabitation des Russes avec les Ukrainiens et les minorités Tatares sont particulièrement édifiants…

Le style d’Andreï Kourkov est toujours empreint de beaucoup d’humanité, de douceur nostalgique mais aussi de poésie, auquel s’adjoignent des commentaires ou remarques sarcastiques bien senties…

‘Les abeilles grises’ est un ouvrage qui interpelle sur l’absurdité du monde , en dehors des sphères politiques et militaires’ mais qui distille malgré tout une certaine langueur assez surprenante avec les pérégrinations de son héros apiculteur, dont le miel constitue une richesse bien plus importante que n’importe quelle monnaie.

Ma note : 15/20
Andreï Kourkov étonnants voyageurs.jpeg
                                              Photo Etonnants voyageurs
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