Mon commentaire :

Le troisième long métrage de la réalisatrice tunisienne Kaouther Ben Hania est un savant mélange entre documentaire et fiction. Il raconte la vie d’Olfa (Olfa Hamrouni, dans son propre rôle), une femme qui élève seule ses quatre filles. Mais un jour, les deux ainées, Rahma et Ghofrane disparaissent, tombant ‘dans la gueule du loup’….

La réalisatrice décide alors de raconter l’histoire de cette famille, afin de nous éclairer sur ce qui est advenu des deux disparues. Pour cela, elle filme bien sûr leur mère ainsi que ses filles cadettes Eya et Tayssir (jouant leur propre rôle) qui témoignent de leurs souvenirs communs. Mais compte tenu de scènes terriblement éprouvantes à jouer pour Olfa qui demeure inconsolable, Kaouther Ben Hania décide de filmer des comédiennes qui incarnent les ainées disparues ainsi qu’Olfa elle-même lorsque les souvenirs sont trop douloureux.

‘Les Filles d’Olfa’, c’’est un cri et un appel au secours pour ces femmes tunisiennes qui s’étaient émancipées sous Bourguiba et jusqu’à Ben-Ali, chassé du pouvoir pour raison de corruption. En Tunisie désormais, ces femmes, qui d’une part ont été élevées dans des valeurs rétrogrades sont tombées peu à peu sous l’influence croissante de la religion islamique dans ce qu’elle a de plus extrême.

Kaouther Ben Hania lève le voile sur la vie des femmes en Tunisie ces dernières années, remettant en cause toutes les traditions transmises de mères en filles, les réactions violentes de celles-ci bravant les interdits et souvent victimes d’endoctrinement, dénonçant aussi la place toujours prépondérante d’un patriarcat étouffant, même si ici, ‘les hommes’ ne sont joués que par un seul et même acteur. Un film inattendu et passionnant, mais surtout percutant et qui laisse douloureusement songeur quand on sort de la projection.

'Les Filles d’Olfa' a été récompensé du prix de L’œil d’Or du meilleur documentaire au Festival de Cannes,