Mon commentaire :

On le sait d’avance en lisant le synopsis, le nouveau film du réalisateur franco-algérien Nadir Moknèche traite d’un sujet peu connu en France, celui du mariage ‘arrangé’, processus encore très commun dans les familles maghrébines. Il s’agit d’une façon comme une autre de préserver la dignité familiale pour des parents attachés aux traditions ancestrales et religieuses, pour cacher des penchants, des démêlés fâcheux avec la justice ou simplement les orientations sexuelles de leurs enfants. Ainsi, Said (Youssouf Abi-Ayad) qui habite encore chez ses parents et travaille dans la boucherie halal de son père (Zinedine Soualem) est secrètement amoureux de Vincent (Arturo Giusi Périer). Incapable de leur avouer son homosexualité, il accepte à contrecoeur un mariage arrangé avec Hadjira (Kenza Fortas), une jeune femme qui de son côté sort d’une histoire d’amour sulfureuse avec un dealer et s’est résignée à subir cette ‘transaction’ orchestrée par sa mère (Lubna Azabal). Malgré tout ce qui les sépare et ce qu’ils ignorent l’un de l’autre, Saïd et Hadjira sont contraints de jouer au jeu du jeune couple amoureux, tout en essayant de préserver leur liberté …

Le film est ingénieusement construit autour de chapitres durant lesquels les différents personnages composant le couple et son entourage sont présentés : une bonne façon de rentrer dans le vif du sujet et découvrir les sensibilités des uns et des autres, les pulsions de Said, les aspirations d’indépendance financière d’Hadjira, leur entourage familial et le voisinage…Au total, beaucoup de fluidité dans le déroulement de cette histoire basée sur un compromis sordide orchestré par des parents décomplexés.. Malgré un sujet grave, on sourit malgré tout souvent en appréciant l’œil moqueur qui est porté sur des traditions totalement dépassées, notamment celle pratiquées par la mère du marié (excellente Saadia Bentaieb)

Grâce à une distribution sans faille – en premier lieu, le très convaincant Youssouf Abi-Ayab qui vient du théâtre – Nadir Moknèche réalise un film simple mais original et touchant qui vaut le détour, dont on ne découvre la signification du beau titre qu’à la toute fin.